Ayant sournoisement atteint le dernier étage tandis que chaque groupe survivait tant bien que mal, l'ignoble fanatique obèse au sexe boursouflé arpentait le long couloir. Sa présence et son ombre reportée sur les murs assombris rendaient l'environnement plus inquiétant que jamais.

En vérité, à l'instar de l'araignée effrayée par l'homme mais qui lui inspire généralement tant de peurs, Takano était paniqué. Il avait abandonné sa seringue pour se concentrer sur une seule arme, ses mains potelées et grasses agrippant fermement son X-Gun. Ses yeux exorbités d'angoisse scrutaient les ténèbres.

Un bruit métallique, proche du grincement, explosa plus loin dans le couloir. Il sursauta, lâchant quelques flatulences en s'époumonant en un long cri aigu traduisant sa frayeur.

" Hiiii ! "

Il se rua bruyamment dans la salle la plus proche, refermant la porte derrière lui...

Se croyant à l'abri de tous dangers, l'otaku s'était réfugié dans cette salle sans en connaître la nature. Modestement éclairée, la large pièce de cet étage particulier abritait deux longues rangées de lits alignés. Une vingtaine de comateux survivant grâce aux diverses machines qui maintenaient actives leurs fonctions vitales. La plupart étaient dans un sale état, recouverts de bandages et pratiquement tous alimentés par d'importants appareils respiratoires.



Takano demeura figé, terrifié par ce spectacle macabre. Mal à l'aise pour la première fois, il progressait pourtant au milieu de l'allée froide. Les exhalations de chaque corps étaient bruyantes. Réunies, elles constituaient un vacarme oppressant.
Les bruits et les fracas insistants qui habitaient le couloir derrière cette porte fermée pressèrent le nudiste qui, bien qu'en proie à une peur viscérale, atteignit le fond de la salle. Se collant au mur froid, il se courba ensuite tout tremblotant, ses globes oculaires balayant frénétiquement l'endroit Il était victime d'une paranoïa aigu.

En panique, dégoulinant aussi bien de sueur que de peur, l'Otaku se mettait à gémir entre ses mâchoires grinçantes et claquantes. Les bruits du couloir s'intensifiaient, lui infligeant des frissons d'effroi.

" Hiiii ! Hi... Hiiii !! "

Il couinait comme une truie qu'on amène à l'abattoir.

Tremblant de plus en plus fort, il guettait fiévreusement l'unique porte de la chambre. En parallèle, les respirations mécaniques des comateux s'accentuaient. Au paroxysme de la confusion sonore, le silence s'imposa en un coup d'éclat. Les bruits extérieurs avaient subitement cessés. Un silence pesant régnait à présent.

Il fut vite comblé par le bruit des appareils de respiration artificielle, lents, synchronisés... terriblement angoissants. Takano était dans un tel état de stress que la bave écumait abondamment de ses lèvres charnues, dévalant son menton gras et sa poitrine opulente.
Il eut un moment de vide, comme assommé par l'adrénaline.
Quand il retrouva ses esprits, il fit une découverte macabre qui le laissa épouvanté. Tous les patients étaient assis sur leur lit, tournés vers lui dans un silence glaçant. Les bandages et les cicatrices les recouvraient, corps aveugles désespérément maintenus en vie... et ils reprenaient possession de leurs moyens pour accuser l'innommable. Tous respiraient longuement, en un même temps. Puis ils tendirent leurs doigts maigres et ravagés vers l'intrus qui urinait sur ses jambes potelées.

Takano poussa un cri de terreur indescriptible.


Sans demander son reste, l'otaku ouvrit précipitamment la fenêtre derrière lui et se jeta à corps perdu dans le vide, sans même réfléchir plus longuement aux conséquences. Rigolant nerveusement alors qu'il pleurait, aveuglé par ces larmes amères, il ne vit ni ne sentit la chute raide qui le fit s'écraser de tout son poids contre le bitume du parking de l'hôpital.


Une vie inutile, pour une perte semblable.