Hermann courrait à perdre haleine pour essayer de rattraper son client.
Celui-ci courrait loin devant lui, mais Hermann avait remarqué sa nyctaphobie et les lampadaires étaient la seule source de lumière à cette heure.
Klaus était donc forcé de suivre la route.
Heureusement car sans cela, il aurait vite fait de perdre sa trace.

Le voyage s'était pourtant bien passé, même si ,maintenant qu'il y repensait, son protégé n'avait fait que dormir, hormis lors de l'unique repas qu'il avait pris machinalement.
Hermann en déduisit qu'il avait été drogué et en maudit ses employeurs. Cette chère madame Nochenmal s'était bien gardée de le prévenir lorsqu'elle lui attribua la protection de son fils.
Il savait que leur rejeton était devenu fou, les rumeurs dans l'entreprise parlait même d'un homicide enterré par un juge bien arrosé.
Mais il ne se doutait pas d'une telle furie.

Lorsque leur avion a atterri à Narita, Klaus était encore docile et se laissait guider facilement.
Mais comme par hasard, la drogue qu'on lui avait injecté cessa de faire effet pile au moment où ils devaient passer dans le hall.
Si Hermann avait été plus attentif, il aurait remarqué l'expression apeurée de Klaus et n'aurait pas été surpris lorsque celui-ci hurla et couru vers la sortie en frappant tous ceux qui se mettaient en travers de son passage.
Le garde du corps se demanda un instant à combien s'élevaient les dommages et intérêts que ses victimes ne manqueraient pas de réclamer. Il avait entendu plusieurs fois le craquement caractéristique d'un os qui se brise.
Heureusement qu'il avait pu le suivre à l'extérieur avant que le service de sécurité ne le rejoigne.

Mais il était anxieux à l'idée de revenir récupérer ses bagages.

Qu'importe, s'il ne retrouvait pas ce taré, il n'aurait guère le loisir de s'en soucier.
Aussi força-t-il l'allure en courant à côté de la bretelle qui menait à l'autoroute de Shin Kulo.
Il finit par retrouver Klaus à l'entrée de celle-ci.
Celui-ci continuait d'avancer, infatigable.
Hermann ralentit, persuadé que Klaus n'était pas assez fou pour oser traverser une autoroute, même à cette heure.

Il se trompait sur ce point.

En revanche, il avait raison sur le fait que marcher sur une autoroute faisait passer l'espérance de vie humaine moyenne de 90 ans à 5 minutes.

Les deux premières voies furent traversées sans problèmes, mais la troisième le fit rencontrer assez violemment un taxi qui partait de l'aéroport.
Hermann traversa à son tour pour le rejoindre, alors que le conducteur et ses clients sortaient de la voiture.
L'un d'eux, un salaryman dans la trentaine, sortit un cellulaire pour appeler les urgences.

Hermann se pencha sur Klaus pour prendre son pouls : il était toujours vivant.
Contrairement à Klaus, il parlait couramment le japonais. Il essaya de savoir combien de temps mettrait l'ambulance pour arriver.

Klaus n'aurait jamais pu supporter un voyage dans le taxi avec ses blessures.

Il resta à vérifier son pouls, jusqu'à ce qu'un véhicule blanc arrive.
Voilà l'ambulance!
Hermann et les autres délaissèrent Kalus un instant pour faire signe au conducteur.
L'ambulance s'arrêta et deux infirmiers sortirent avec un brancard.
L'un deux parla.
Où est le blessé?
Klaus répondit
_Devant le taxi
_Où?
Hermann se retourna pour désigner Klaus, ou du moins, l'endroit où il devait être.
Il y avait des traces de sang, la veste de Hermann qui avait servi de coussin, mais pas trace de Klaus.

Hurrekind!
Hermann avait finalement perdu la trace de Klaus et avec ses blessures, autant dire qu'il était mort.
Et à l'instant où ses employeurs le découvriraient, il serait renvoyé.
Hermann fouilla les environs immédiats jusqu'à l'aube avant de se résigner et de laisser le relais à la police de Tokyo pour aller à l'hotel.