[ Suivre l'ordre de transfert indiqué dans le sujet : https://gantz.forumpro.fr/t673-rentree-explosive-everybody ]

Sakurai était assis par terre, à gauche de la Sphère.
Kuwabara était adossé à la porte menant au couloir, bras croisés et regard enfoui.

Le chrono avait affiché un temps restant vraiment court mais figé, ce qui était une bonne nouvelle. C’était donc vraiment terminé, en tout cas, jusqu’à la prochaine fois. Les transferts commencèrent alors, et ce fut rapidement au tour de la jeune femme. Quand son corps fut complètement matérialisé dans la chambre, Akane mesura à quel point elle avait failli ne pas revoir cet endroit. Sauter de joie aurait été indécent, vis-à-vis de tous ces morts, mais elle était satisfaite d’avoir survécu. Sa tenue Gantz avait été réinitialisée mais son arme de service était restée là-bas. Après une telle chute, le pistolet avait certainement du se disloquer en touchant le bitume, il ne servirait donc pas au premier truand qui le trouverait. Néanmoins, la japonaise devrait signaler cette perte auprès de sa hiérarchie. Perdre ou se faire voler son arme de service n’était pas spécialement bien vu. De surcroît, si on la trouvait près du champ de bataille, certains officiers se poseraient des questions. Pour la militaire, il ne faisait aucun doute qu’une enquête serait menée au sujet de toutes ces destructions survenues dans le stade. Même si c’était un événement rare au Japon, l’attentat terroriste pouvait être évoqué, et si on mentionnait le nom d’Akane Ueno, une certaine militaire, fanatique jusqu’aux bouts des orteils, pouvait rappliquer fissa pour lui pourrir la vie, et ce, en toute légitimité. Néanmoins, pour le moment, la jeune femme devait surtout songer à relâcher la pression, ne pas penser aux épreuves des jours à venir.

Chaque chose en son temps, oui.

La japonaise ramassa ses affaires soigneusement pliées avant de s’adosser au mur près de l’entrée de la cuisine, attendant l’arrivée des autres survivants. Elle ne désirait pas garder la tenue Gantz et comptait se changer, mais pas tout de suite, des fois que Gantz les renvoie lui seul saurait où. Encore une fois, il valait mieux prévenir que guérir. Il pouvait aussi se passer plusieurs jours, plusieurs semaines, en tout cas un temps indéterminé avant que Gantz les rappelle pour une autre mission. Ce temps devrait être exploité au mieux. Akane faisait partie de la Police Militaire. A moins d’être inquiétée par sa hiérarchie, elle pourrait mener une enquête discrète dans son service, pour trouver des faits qui la rapprocheraient de la sphère noire. Le comportement d’un soldat qui aurait brusqué changé, par exemple, qui aurait tenu des propos normalement incohérents après avoir survécu à une mission imposée par Gantz. Parmi les gantzers rescapés, il y avait Zurui qui avait mené sa propre enquête avant même de venir dans la chambre. Si Antonio avait été un loup solitaire, Akane était pour sa part une louve, elle avait l’esprit de groupe. Elle pourrait aider Zurui à chercher la vérité au sujet de Gantz, et également à mieux préparer leur survie pour la prochaine mission. Vargas semblait lui aussi de bonne composition, et Sakyo représentait leur meneur naturel, le plus intelligent, le plus humain aussi. Quant à Takeshi, il préférerait certainement rester seul. Le fumeur n’était pas spécialement fiable même s’il ne fallait pas se fier aux apparences, et il semblait tout aussi solitaire que le bretteur. Quant à Sakurai ... à voir. Bien sur, ce n’était qu’une vague intuition qui faisait penser à Akane qu’une éventuelle communauté de gantzers de bonne volonté pouvait émerger de cette tuerie. Pour sa part, elle préférait donc ne pas s’avancer à ce sujet et attendre la réaction des autres survivants. Akane n’était pas dans leur tête, elle ne lisait pas leurs pensées, elle n’était pas mue par une perception humaine surnaturelle. C’était simplement une éventualité qui lui avait traversé l’esprit en attendant le retour de tous les rescapés dans la chambre.

Un temps de pause après la métisse et l'otaque revint, entier et crade, face au mur opposé à la baie vitrée.
Son premier geste une fois arrivé fût de laisser tomber le sabre dans un tintement métallique et de s'écrouler contre le mur, descendant lentement vers le sol.
Il avait survécu, mais il n'en retirait pas autant de joie qu'il devrait.
Pour une première fois, ça a vraiment été foireux maugréa-t-il.
Ses habits étaient déchirés à de nombreux endroits, laissant voir sa combinaison régénérée.
Son manteau était à peu près épargné, mais son matériel hors Gantz lui manquait.
Plus de téléphone.
Plus d'ordinateur.
Plus d'appareil photo.
Au niveau des pertes, il était tout aussi perplexe.
La brute était écartée de l'échiquier, mais le violeur restait en scène.
Et il restait des bugs possibles.
Commençant à se rappeler des choses, il fouilla ses poches.
Un truc étrangement dur retint l'attention de ses mains qui le retirèrent.
Des fragments de son ordinateur...
Il avait du les prendre durant son délire.
Il jubila en reconnaissant un disque à mémoire solide.
Si le disque dur n'avait pas pris trop de coups, il pourrait récupérer ses notes.
Rangeant précautionneusement le composant, il tomba sur l'objet de son désir.
Un pack de post-it et un crayon à papier de six centimètres.
Il commença à noter ce qui lui passait par la tête, se vidant la tête du stress de la séance.
Il allait devoir se procurer du matériel, mais il avait appris durement que les standards ne pouvaient survivre à ces chasses.
Il allait devoir chercher dans les réseaux parallèles.
Mmmh, peut-être ce Ivan du mois dernier? Il nous avait écrit qu'il nous ferait un prix.

Les transferts avaient commencé, mais Sakyo ne se sentait pas soulagé pour autant. C'était encore les derniers mots du Stoned qui n'étaient pas là pour le rassurer.
En regardant autour de lui, il avait pu alors constater le nombre conséquent de morts et "d'absents". Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que ces derniers avaient dû tomber dans le vide, comme Akane l'avait elle aussi risqué. Aussi, il s'inquiéta pour Vargas qui, malgré sa bienveillance, avait tout de même été estropié. Il ne s'en était alors rendu compte que maintenant, se soulageant encore une fois en pensant au système de "sauvegarde" instauré par la Sphère.

Mais malgré cela, même s'il savait qu'il avait fait le bon choix, le romancier se rendait compte qu'il avait agi de façon désespérée, et qu'il aurait pu tuer un autre coéquipier de la sorte. Il détestait Antonio, mais il aurait préféré l'avoir à ses côtés, le connaissant comme étant une valeur sûre et un combattant hors-pair. Et dans tous les cas, il aurait préféré ne pas avoir à le tuer. Car c'était bien ce qu'il s'était passé, d'une certaine manière...

"Je le sais Vargas... Mais... Je ne suis pas prêt pour ça..."

Aussitôt, il fut transféré dans la Chambre à son tour. Alors il repensa de nouveau à la sauvegarde et se maudit de ne pas avoir pensé à récupérer au moins son fusil, de manière à être bien armé pour la prochaine fois. De la sorte, il aurait pu laisser des armes aux pauvres nouveaux décédés, ce qui les aurait tous avancés. De même, il aurait pu s'entrainer au tir durant leur période de répit et tenter d'être plus efficace...
Il repensa ensuite à Takeshi qui n'était pas encore arrivé dans la Chambre. Ce dernier avait été grièvement blessé et avait beaucoup usé de ses forces alors qu'il subissait une importante hémorragie. De plus, il semblait clair que ce dernier, suite à l'expérience qu'il avait eue, qu'il devait peut-être avoir acquis les cent points... S'il mourrait ici, ce serait d'une injustice incommensurable...
Alors il se dirigea vers Akane.

"Vargas va arriver, il va bien. Mais vous avez vu Takeshi? Comment va-t-il?"

Sakyo arrivait à son tour, il avait l’air inquiet, mais c’était peut-être juste de la fatigue, c'était difficile à dire. Il se dirigea vers Akane et lui dit que Vargas allait arriver, qu'il allait bien. La jeune femme hocha la tête et allait lui répondre qu’elle était heureuse d'apprendre cette bonne nouvelle, mais l’écrivain enchaîna et lui demanda sans transition si elle avait vu Takeshi, comment il allait. A ces mots, la jeune femme se souvint des derniers événements et elle sentit une goutte de sueur glacée couler le long de son échine, en un frisson d’angoisse grandissant. Pour la militaire, lorsque Sakurai avait été le premier transféré, elle s’était dit que c’était terminé, dans le sens où les rescapés se retrouveraient sains et saufs dans la chambre. Son regard inquiet se fixa sur celui du jeune homme, comme une personne qui commence à réaliser qu’elle vit un cauchemar et qui désire de plus en plus ardemment se réveiller.

"Takeshi, ça va aller, il va arriver … je l’ai rejoint pendant le combat, il était grièvement blessé mais ses garrots tenaient bon ... ensemble, on a attaqué le monstre … quand le Martien a été vaincu, j’ai dit à Takeshi qu’il devrait rester éveillé, même si c’était à priori terminé. Je savais …"

Elle chercha ses mots quelques instants avant de continuer :

"Je savais qu’on devait alors être transférés, à moins qu’un Martien ait survécu et nous attaque … je restais sur mes gardes … pendant ce temps … Takeshi s’est allongé … je crois qu’il a dit qu’il était fatigué, qu’il avait besoin de dormir … juste après, les transferts ont commencé et je ne me suis pas fait de soucis … il va arriver, vous allez voir, il va arriver … juste après Vargas …"

Akane ne quittait pas Sakyo des yeux. Dans le regard de la jeune femme, il y avait une possibilité différente de ses paroles, un risque qu'elle ne pouvait pas formuler par des mots. Dans les yeux d'Akane, il y avait l’angoisse que Takeshi soit mort là-bas, avant que son transfert commence, et dans ce cas, Gantz ne le ramènerait pas … qu’attendait-elle de Sakyo, qu’il lui mente ? Qu’il lui donne de l’espoir ? Une chose était sure, les prochaines secondes allaient être très longues. La mission avait été une tuerie, fallait-il encore rajouter une mort pendant le transfert des gantzers ? Fallait-il une autre injustice ? Plus que jamais, Akane désirait se tromper, que Takeshi revienne dans la chambre. Ce n’était plus une question d’attirance entre eux, c’était une question d’estime, de respect. Akane respectait le choix de Takeshi de mener la voie du combattant solitaire, non par goût de la chasse comme Antonio mais parce qu'il se battait certainement plus à son aise seul, sans risquer la vie des autres gantzers. Non, Takeshi devait revenir, il ne pouvait pas mourir juste à la fin de la mission. Il devait revenir. Il devait revenir. Takeshi allait revenir. Il allait revenir.

Vargas arriva dans la chambre à terre l’air paniqué, les mains mis de sorte à se protéger d’une attaque. Les yeux encore tétanisés par la vision de cette horreur de trois mètres qui avait massacré le docteur.

Il regarda rapidement autour de lui. Il était passé de la vision d’un bras géant fondant sur à celle de cette chambre qui commençait à devenir familière. Il y avait le surfeur, la garçon qui se murait dans le silence, Akane, Yarashin qui avait les vêtements en lambeau et Sakyo.

Il se calma et se releva doucement.

« Que c’est-t-il passé? »

Il regarda encore autour de lui pour voir si d’autres membres de leur groupe arrivaient.

« On était dispersé sur le terrain et il y avait ce monstre. Le docteur… »

Voyant Akane se confondre dans ses paroles, le romancier sentit l'espoir le quitter petit à petit, devenant alors presque sûr que Takeshi allait perdre la vie... Le pauvre avait été malmené alors qu'il avait perdu ses jambes, et la combinaison devenue hors service, il n'avait plus aucune support sur lequel réguler sa douleur... S'il partait, ce serait encore un vétéran, et un des meilleurs, qui perdrait la vie. Pendant un instant, Sakyo ressentit l'envie de jeter la faute sur sa coéquipière qui n'aurait pas été capable d'aider le sabreur. Mais il s'était bien vite rendu compte qu'elle partagerait sans aucun doute un sentiment que lui-même avait ressenti lors de ses précédentes missions. Sentiment qui perdurait malgré tout... Mais il ne pouvait pas sauver tout le monde, encore une fois...

Ne sachant que dire, c'est en fait l'arrivée de Vargas qui rompit le silence qui avait suivi les justifications indirectes de la militaire. Le pauvre homme était choqué, déboussolé, et ne semblait pas comprendre ce qui était arrivé. Grâce au site de Nishi, et à l'expérience de Kyou, Sakyo avait pu comprendre ce dont il s'agissait. Aussi, il lui apporta les réponses.

"Vous avez été grièvement blessé. A tel point que votre corps a été "sauvegardé". Dans ces moments là, si l'on survit jusqu'à la fin de la mission tout en étant blessé, le corps est restauré juste à l'instant où l'on reçoit cette blessure. C'est pour ça que vous n'avez pas d'autre souvenir."

Mais le vieil homme n'avait pas toutes les réponses: Il ne savait pas ce qu'il s'était passé sur ce terrain. Aussi, l'écrivain y vint rapidement, sans entrer toutefois dans les détails.

"Quant à ce qui s'est passé... On a réussi, au prix de beaucoup de vies... On sera tout juste six, peut-être. Sept... Si Takeshi a de la chance..."

Sakyo s'était préparé à l'éventualité de sa mort bien rapidement. Peut-être trop. Il s'habituait tragiquement aux morts qui affluaient et savait qu'il ne pourrait jamais tous les aider. Il ne pouvait pas même quitter cet enfer avec les cent points, car il se connaissait un passé suicidaire avant cette Chambre. Il était condamné à devenir un chasseur, sans peurs et sans reproches. Crainte qui s'était affirmée face à la "Nurse Brune" et qui s'était encore une fois confirmée en envoyant Antonio... Mais tant qu'il essayait encore de garder son rôle bienveillant, alors tout allait bien... Du moins, il l'espérait...
Tout en se tournant vers Zurui, il évoqua une chose qui serait utile pour lui et peut-être pour les autres. Mais il avait besoin du jeune geek pour accéder à cela.

"Il nous faudrait voir le "Tableau Mortuaire", mais je ne sais pas comment l'activer. Je connais seulement son existence..."

Il l'avait connu grâce au site de Nishi, encore une fois. Mais la première raison pour laquelle il voulait le voir, c'était avant tout pour savoir ce qu'il en était de Kyou et de Reika...

L'otaque avait déjà rempli plusieurs post-it de ses griboullis lorsqu'il se rendit compte que c'était à lui qu'on s’adressait.
Levant le nez, il prit un air étonné avant de se concentrer.
Si je me souviens bien, il faut un contact physique pour initier la connexion.
Il se releva, avançant sur le côté de la sphère ouverte.
Je crois que c'est dans l'oreille.
Oui voilà, il faut mettre l'index contre le tympan puis prononcer la requête à haute voix.
Il commença à se pencher pour s'exécuter, puis s’arrêta.
Ah mince, il faut attendre la fin du décompte des points pour qu'il active l'interface.
Son ordi lui manquait.
Ah, au fait, vous avez toujours votre caméscope?

Sakyo s'étonna devant la réponse apportée par Zurui. Un contact physique? C'était bien particulier quand on savait que cette sphère pouvait téléporter, soigner, et fournir des armes d'une telle puissance. Mais quand il comprit que ce dit contact était censé être dans l'oreille, il se dit alors que c'était presque scandaleux.

*Ce truc se fout vraiment de nous!*

Mais il se rappela que l'univers dans lequel Gantz les plongeait était particulier. Tout comme ses adversaires. Et vu ce qu'Akane leur avait dit, concernant un certain Boss rose fluo en tenue de pompom girl, il fallait bien croire que cette sphère devait être sélective en mettant les têtes de ces aliens à prix. Et puis le simple fait d'avoir dû combattre des infirmières était tout de même singulier, même si elles étaient monstrueuses.
De toute manière, il semblait bien qu'il fallait attendre le décompte des points avant de faire cette requête. Lorsque l'otaku lui avait dit cela, le romancier s'était alors demandé s'il était proche des cent points, et s'il était encore capable d'aboutir à son projet: acquérir plusieurs fois les cent points, avoir de meilleures armes, et ensuite commencer à ressusciter ceux à qui il tenait. Tenir son rôle de leader bienveillant malgré lui, en somme. Puis on lui demanda s'il avait son camescope...

"Et merde..."

Il se maudit un instant de ne pas avoir ramassé ses affaires sur le lieu du combat... Son Notebook ET son caméscope... Cela lui avait coûté plus de trente mille yens... Il avait encore les moyens de s'en payer, mais ça poserait problème sur le long terme... Et ayant abandonné l'université pour se concentrer sur Gantz et son roman, il n'allait plus avoir accès à ses bourses. Du travail, voilà tout...

"Il est resté sur le terrain, avec mon Notebook... Près d'Himiko et Akane, quand tu as été attrapé par le Smoker. Ils ont dû être détruits..."

Il avait été grièvement blessé puis réinitialisé à l’image d’un ordinateur. Ils avaient vaincu mais au prix de terribles pertes. Pour l’instant, ils n’étaient que six et l’inquiétude pouvait se lire sur le visage de la militaire.

Alors que Yarashin et Sakyo parlaient d’un tableau mortuaire. Le vieillard préféra s’adosser à un mur et de s’assoire pour digérer la tension qu’il avait essuyé durant ces deux parachutages dans des lieux aux créatures toutes aussi terrifiantes les unes que les autres.

Il avait encore les images de ceux qu’il avait vu mourir, Kentaro ce jeune adolescent qu’il n’avait pas réussi à maintenant suffisamment longtemps avant la fin de la première mission, il s’en voulait encore, puis il y avait le médecin qu’il avait vu se faire déchiqueter par le monstre aux bras qui s’allongeaient.

Puis le jeune écrivain parla de son caméscope et de son notebook qu’il avait apparemment perdu lors de leur dernière mission.

« Je sais que c’est le dernier lieu auquel j’aimerai y retourner si on exclu cette appartement, mais nous pourrions y retourner pour voir si on peut récupérer vos affaires. »

Puis il pensa à l'éventualité qu'il y ait déjà la police sur les lieux. Avec le bruit qu'ils ont fait et la massacre qu'il y eut, la police pourrait être déjà en route.

"Si jamais il nous est impossible d'y retourner, je n'aurai racheter ce qu'il vous manque."

Le regard de Sakyo était aussi inquiet que celui d’Akane. Vargas était alors revenu dans un état de confusion certain, mais toujours pas de retour pour Takeshi. Les secondes passaient, et toujours rien. La militaire avait vu des coéquipiers mourir, peu comparé à sa carrière encore jeune, toujours trop au demeurant. Le soldat devait alors s’endurcir pour ne pas craquer mentalement, un peu comme un médecin, un peu comme tous ceux qui côtoyaient trop souvent la mort. Etreignant plus fort que nécessaire ses habits, la jeune femme respirait très lentement pour retrouver son sang-froid pendant que l’écrivain expliquait à Vargas qu’il avait été réinitialisé juste au moment où il avait été blessé au bras. Ainsi, il ne se souvenait pas de qui s’était passé après qu’il ait reçu cette blessure. Takeshi aurait aussi tout oublié à partir du moment où ses jambes avaient été coupées, ne se souvenant plus de leur coopération dans les derniers instants du combat, mais ce serait un détail s’il pouvait revenir. En fait, la jeune femme préfèrerait qu’il soit en vie et les oublie tous, mais dans la vie, on faisait ce qu’on pouvait, pas ce qu’on voulait.

*Il l’enterre déjà*

Akane foudroya brièvement Sakyo du regard quand il envisagea la mort de Takeshi, avant de se calmer derechef, avant que son regard redevienne flou et qu'elle regarde devant elle sans voir vraiment. L’écrivain était un vétéran en ce lieu, il devait certainement accepter plus vite qu’elle cette autre perte tragique. Les secondes continuaient à s’écouler, et toujours pas de retour pour le bretteur. Sakyo parla alors d’un tableau mortuaire, et Zurui lui dit qu’il fallait établir un contact physique dans l’oreille de l’humanoïde qui se trouvait à l'intérieur de la sphère noire pour afficher ce tableau. C'était original … passant des paroles à l’acte, Zurui allait le faire quand il ajouta qu’il fallait d’abord attendre le décompte des points. Si Takeshi était parti, ça n’allait pas tarder. Zurui conclue en demandant à Sakyo si ce dernier avait toujours son camescope. Sakyo répondit qu’il était resté sur le terrain avec le notebook, près d’Himiko et d’Akane, qu’ils avaient du être détruits.

"Ha oui, le sac ..."

Ce souvenir revenait à la jeune femme, elle répondit d’une voix morne à l’écrivain :

"Un ennemi a jeté le sac sur Himiko. Je contournais alors le martien, mais il me semble qu’Himiko a tranché le sac d’un coup de sabre. Le matériel dont vous parlez devait marcher beaucoup moins bien, après un tel choc …"

Takeshi n’était toujours pas de retour, Vargas semblait demeurer le dernier transféré. Takeshi serait mort à moins d’une minute de son transfert. Si Gantz l’avait ramené en premier, il aurait certainement survécu. Avait-il attendu que le bretteur meurt et ne soit ainsi pas ramené ? Qu’étaient les gantzers pour Gantz ? Ses soldats ? Ses ennemis ? Ses cobayes ? Qui se cachait derrière tout ça ? Dans les mains de la jeune femme, ses habits étaient alors froissés par la pression de ses mains, sans même qu’elle s’en rende compte, son regard était toujours vague, comme perdu, comme vide.

"Si j’avais su que Gantz était capable de ça, j’aurais veillé à ce que Takeshi ne perde pas connaissance … je l’aurais secoué … je lui aurais filé des baffes … de bons pains faits maison ..."

Voila qu’elle radotait, elle parlait toute seule.

L'intention du vieil homme était louable, mais selon Sakyo, il semblait bien impossible qu'il puisse rester ses affaires sur les lieux. Que ce soit son ordinateur ou les armes qui devaient désormais joncher la pelouse artificielle... Et même les cadavres de leurs compagnons, parfois tombés du bâtiment... Mais Akane avait de toute manière fait comprendre aux interlocuteurs que la récupération de ces outils serait impossible, puisqu'ils avaient été détruits par Himiko elle-même, en se défendant face au Smoker. Elle devait s'être battue comme une lionne, jusqu'à sa mort où elle avait tenté de contrer le Stoned. Mais pour l'écrivain, qui pensa un instant égoïstement, il s'était plutôt désolé qu'elle n'aie pas essayé de faire en sorte d'attraper la chose, puisque la combinaison devait le lui permettre.

*Et voilà... Tant de yens gaspillés...*

Vargas lui avait proposé de lui racheter ses affaires, ce qui était particulièrement bienveillant, mais aussi étonnant. Après tout, bien qu'ils aient partagé des aventures singulières, il n'imaginait pas qu'on puisse lui apporter cette aide. Mais il se rappela alors Kyou et Reika, avec qui il avait commencé une très grande collaboration et envers qui il vouait une amitié des plus importantes.
L'écrivain s'apprêta à leur proposer de collaborer pour des entraînements, comme il l'avait alors fait précédemment, mais une nouvelle téléportation eut lieu.

"Nom de Dieu... Je n'y croyais plus!"

C'était Takeshi, bien entendu. Le dernier gantzer vétéran. Les paroles d'Akane avaient été tellement peu porteuses d'espoir qu'il avait prédit sa mort, mais il avait eu tort. Et jamais il ne se sentit aussi bien en s'étant trompé sur un évènement aussi funeste!
Comme ce dernier avait été blessé aux jambes et avait certainement subi une sauvegarde, Sakyo lui fit un très bref résumé de la fin de la mission.

"Tu as beaucoup aidé en t'étant battu contre le Stoned: comme il mettait du temps à se régénérer, on a pu en finir avec lui, mais il a pu attaquer encore plusieurs aux gantzers. C'est pour ça que tu te souviens de rien. Au final, j'ai pu "l'envoyer"... Mais Antonio est mort lui aussi... On est tous là. Sept seulement... Tu es le dernier survivant."

En fait, Gantz était aussi capable de transférer un dernier gantzer bien après tous les autres. Akane avait résisté au désir obscur de fermer les yeux, et ce n’était pas pour rien. Elle gardait une once d’espoir de voir Takeshi revenir, et ce fut le cas. Le regard de la jeune femme sembla reprendre vie au fur et à mesure que le bretteur reprenait corps dans la pièce. Elle faillit même lui sauter au cou de joie, mais finalement elle se retint, parce qu'ils n’étaient pas si proches que ça. Ils s'étaient en tout vus, quoi, deux fois ? Deux fois en comptant ce lieu, ce qui faisait tout de même peu. La jeune femme s'était infligée elle-même un délire romanesque bas de gamme en faisant du bretteur son mâle alpha. Elle avait réagi de façon aussi ridicule que feu la bourgeoise quand cette dernière suivait le fumeur comme son ombre. Cette pensée combinée à la satisfaction de voir Takeshi toujours en vie la fit rougir, ce qui ne se verrait pas sur sa peau de métisse, un avantage en la circonstance. C’était peut-être indécent quand on songeait aux autres morts mais ça faisait toujours une injustice en moins, pensa-t-elle en poussant un long soupir de soulagement. Toussotant ensuite, la japonaise entreprit de lisser sa veste, de la rendre moins chiffonnée.

*Si j’avais su, je lui aurais mis un pain*

Takeshi ne s’en serait pas souvenu, et ça aurait fait du bien à Akane. Le gantzer et son instinct impulsif à jouer cavalier seul lui avaient tout de même envoyé quelques vents bien sentis. Akane devait être la fille la plus aérée du Japon. En plus, quand Sakyo avait évoqué la perte possible de Takeshi, elle lui en avait même voulu alors qu'il lui avait sauvé la vie, même si ce grief n’avait duré que le temps d’un battement de cils, et elle avait froissé sa tenue certes propre mais déjà … pas vraiment impeccable parce que c’était ce qu’elle portait quand elle se reposait chez elle … pendant que l’écrivain résumait la situation au bretteur, la militaire vérifia si le bandeau pour sa poitrine était bien toujours dans la doublure de sa veste. C’était le cas. Ca savérait être le genre de détail qu’il valait mieux qu'elle ait toujours sur elle. Dans une poche interne, elle retrouva aussi sa brosse à dents de voyage, avec un petit stock de dentifrice à moitié plein dans le manche, mais pas sa boussole dont elle se servait au demeurant rarement chez elle, hum. Pas de couteau, pas de couteau suisse, elle aurait été capable de se blesser en s’en servant.

"Takeshi-san, c’est une joie de vous voir en vie. Gantz a nettement décalé votre retour, c’était inquiétant."

Dit-elle en regardant amicalement le gantzer, le saluant en s'inclinant brièvement vers lui. Le décompte ne devrait alors plus tarder. La jeune femme se demanda s’il serait possible de pirater informatiquement la sphère noire, pour découvrir quel secret Gantz dissimulait, pour ramener des gantzers à la vie, pour éviter d’autres tueries ou au minimum pour mieux les équiper. Zurui devrait pouvoir fournir un début de réponse à cette interrogation. Ils pourraient toujours y réfléchir à tête reposée, le tout était d'éviter de se disperser quand ils pourraient quitter cet endroit. A voir, donc.

Lorsqu'il ouvrit les yeux, Takeshi vit d'abord Sakyo. Celui-ci sembla étonnement soulagé de le revoir. Sans doute que le bretteur fut touché par ces sentiments. Un peu perdu, il savait néanmoins à quoi s'en tenir concernat sa perte de mémoire. Par ailleurs, il n'eut pas besoin de demander un récapitulatif car l'écrivain s'en chargea aussitôt. Le Gantzer d'Osaka fut alors surpris par la capacité d'adaptation du jeune garçon, meneur de cette Chambre en dépit de son apparence chétive. Il le respecta pour ce simple fait et comprit mieux pourquoi il occupait ce rôle.

Après lui avoir prêté une oreille attentive et remercié d'un signe de tête, Takeshi chercha du regard les six survivants. Beaucoup de pertes. Si elles étaient évidemment regrettables, elles ne l'affectaient pas. C'était ça, le fardeau d'être vétéran : la mort banalisée.
Qui restait-il ? En face de lui, il y avait le vieil homme et l'intellectuel, mais il remarqua surtout Akane. La voir ici saine et sauve rassura tout à coup l'épéiste. Il était même content. Il lui adressa un regard discret avant de continuer son inspection, apercevant le discret garçon aux yeux plissés derrière la militaire, puis... cet homme.
Il sentait sa présence et l'odeur de tabac. Il jugea cependant inutile de lever des soupçons, il savait par expérience que ce genre d'opportunistes détraqués étaient parfois les seuls à survivre, mais pas systématiquement.

Les paroles douces d'Akane ramenèrent son attention sur elle. Si on ne vit pas la rougeur sur le visage de la métisse, ce ne fut pas le cas pour celui du concerné. Il lui rendit la politesse.

" Merci Akane-san, je suis également heureux de vous voir. "

Il la fixa instinctivement ensuite. Quel rapport y avait-il entre eux deux ? Du respect ? De l'affection ? Plus encore ? Dans son coeur, Takeshi ressentait en effet de l'affection pour la demoiselle. Néanmoins, il savait que s'attacher à quiconque en cet endroit pouvait être une douleur accablante et parfois même une fatalité. C'était la raison pour laquelle il se comportait ainsi, si réservé, si humble, si solitaire...
En revanche, voilà que plusieurs personnes lui témoignaient cette affection qu'il évitait de manifester. C'était une situation troublante mais chaleureuse, nouvelle aussi. En effet, il avait tenté d'aider tout le monde à Osaka et en avait souffert, et jamais son retour n'avait réussi a suscité une quelconque émotion. Ici, c'était différent.

Derrière un visage sérieux légèrement baissé naquit un sourire discret des plus touchants...

Le transfert de Takeshi sembla redonner du baume aux cœurs des survivants. Vargas nota même un enthousiasme plus prononcé chez la militaire, ce qui le fit sourire.

Selon les paroles de Sakyo, le vétéran avait subi le même effacement de mémoire qu’il avait eu et apparemment il s’était lui qui avait combattu le plus le Stoned.
Antonio était mort lui aussi. Même si il n’avait pas apprécié son comportement arrogant, en il en avait mal au ventre en repensant à tout ces gens qui ne méritaient pas de finir ainsi.

Il se releva et s’adressa au sabreur.

« Content que cette sphère n’ait pas emporté une vie de plus. » Dit-il d’un ton qui tentait de maîtriser une colère naissante envers Gantz.

Son regard se porta sur Yarashin. Il avait parlé d’un tableau mortuaire avec l’écrivain. Le vieil homme était horrifié rien qu’à l’idée du nombre de victimes que pouvait comporter ce tableau.

Puis une sonnerie fut diffusée par la sphère. Un tableau s’afficha indiquant que le dernier survivant du groupe avait acquis les 100 points lui permettant de faire un choix parmi trois possibilités.

« Si j’ai bien compris, grâce à ça on a la possibilité de fuir cet enfer. Vous êtes resté beaucoup trop longtemps ici, vous devriez sauter sur l’occasion. »

Le score s'afficha après quelques secondes. Le temps pour Takeshi de reprendre conscience de sa survie, sans doute, et de se rendre compte des survivants qui avaient pu rester ici. Sakyo n'avait pas eu l'occasion de connaître le surnom de l'homme, mais il comprit de suite ses paroles lorsqu'il avait parlé de leur "formation" à l'hôpital, afin d'explorer les lieux plus rapidement. La "formation en sushis". Ce type devait être un cuisinier? Cela expliquerait son talent avec les armes blanches, peut-être.
Et puis le score...

"100 points... Je n'étais même pas certain de voir ça un jour..."

Il regarda le combattant, puis le romancier pensa que là, alors, c'était terminé. Il resterait le seul vétéran de la Chambre A. Cependant il était tout de même très reconnaissant envers le sabreur qui les avait aidés tout au long de ces deux missions. Il avait été efficace, mais avant tout quelqu'un d'honorable en qui l'on pouvait avoir confiance. Il l'avait démontré en s'occupant du Stoned à lui seul, par ailleurs. Mais même s'il était devenu le plus fort de la Chambre il allait devoir la quitter un jour ou l'autre...

"Et voilà... C'est terminé pour vous, on dirait."

Il s'approcha et lui posa une main amicale sur l'épaule. Sakyo n'avait jamais été tactile, mais c'était une forme d'adieu qui pouvait montrer à quel point il avait été heureux de le compter dans leur équipe.

"On vous est tous vraiment reconnaissants. Merci pour tout."

Le temps des réjouissances laissa place à la réalité et aux choix. Ces mêmes choix s'affichèrent, tandis que le vieil homme et Sakyo l'engageaient à prendre un repos qu'ils semblaient estimer bien mérité.


Trois choix.
N'importe quel être-humain doué de raison et tenant à la vie fuirait cette Chambre au plus vite, sans même hésiter ni réfléchir une seule seconde. Mais Takeshi était différent. Il n'avait personne : ni femme, ni enfants, ni famille... même pas un animal de compagnie.
Longtemps, il s'était imaginé ce fameux moment sans vraiment y croire. Il avait vu d'autres vétérans partir, d'autres obtenir une arme plus puissante, mais jamais aucun n'avait ressuscité quelqu'un à la vie. Pourtant, il avait vu des couples et des amis.

Les sourcils froncés, le Gantzer d'Osaka contemplait les caractères particuliers.
Il s'exprima, se tournant préalablement vers Sakyo qui lui tenait amicalement l'épaule.

" Merci de votre attention. Cependant... "

En marquant une pause, le regard trouble de l'épéiste se tourna vers ses mains crispées.

" ...Je ne peux pas partir. "

Cette réponse en étonnerait sûrement plus d'un. Alors il reprit aussitôt.

" Il m'est impossible de m'imaginer inconscient de cette réalité, à vivre ma vie ainsi alors que je suis en mesure d'amorcer un minimum les conséquences. Des centaines de civils sont morts injustement... je me sens le devoir de les protéger, aussi minime mon aide puisse-t-elle être. "

Il ne se voyait pas comme le justicier masqué du Japon, il avait simplement cette "chance" d'utiliser ses capacités à bon escient, employer de la manière la plus honnête et brave la voie guerrière du sabre transmise par sa famille. Et il se sentait dans son élément, au travers de ces combats. Il se sentait une utilité réelle dans ce monde.

" Quant à l'arme plus puissante, je la connais et je ne suis pas en mesure de l'utiliser. Pour moi, elle ne serait qu'un handicap, alors... "

Il se tourna naturellement vers Sakyo, meneur naturel de cette équipe.
Son choix était fait et il ne reviendrait pas dessus. C'était ce que son coeur voulait, être le Gantzer d'Osaka ayant permis de ramener quelqu'un à la vie.

" Alors si vous désirez ramener quelqu'un à la vie, demandez-le moi. "

"...Comment?"

Une question rhétorique, bien entendu. Mais Sakyo n'y croyait pas vraiment. Plutôt que partir, Takeshi avait décidé de les aider manifestement une dernière fois. Le romancier avait alors repensé au fait qu'il appartenait à une chambre différente, à Osaka. Aussi, quoiqu'il arrivait, il les quitterait pour de bon, après avoir faire ce choix. Mais vraiment, Sakyo ne comprenait toujours pas pourquoi il choisissait de ressusciter un inconnu, plutôt que de quitter définitivement cet enfer... En fait, aux yeux de l'écrivain, il était bien plus vertueux que lui-même, qui essayait de tous les aider. De plus, il aurait pu faire le choix de prendre une meilleure arme, afin de s'aider lui-même, de façon individuelle. Mais non, il avait préféré tous les aider...
Les raisons pour lesquelles il ne voulait pas partir lui rappelèrent sa propre situation: son suicide. Lui aussi était forcé de rester dans cette chambre jusqu'au jour où il perdrait la vie. Ou alors le jour où, peut-être, ce serait fini... Dans tous les cas, cela restait une intention louable. Sakyo se sentait un peu pareil, à vouloir défendre les autres du mieux qu'il le pouvait, mais il ne se sentait pas capable de rester ici uniquement pour cette raison. Continuer à se battre uniquement pour la survie de l'Homme, c'était différent de la condition de l'écrivain qui, lui, y était contraint. Aussi, il se sentit mal, et une force invisible compressa sa poitrine, le faisant se sentir de plus en plus mal...

Sakyo pensa un instant à le contraindre de changer de choix, de s'en aller, car il ne pourrait peut-être pas vivre plus longtemps en combattant encore, pendant tant de missions. Mais son instinct le poussa à changer d'avis... Il y avait bien quelqu'un que lui voulait ressusciter. A vrai dire, il y en avait plusieurs... Konoe avait été peut-être la dernière "prioritaire" parmi ceux qu'il voulait revoir à ses côtés, par exemple. Mais lors de sa première mission, il y avait eu deux personnes qui l'avaient beaucoup aidé. Il y avait l'aveugle, qui avait démontré une force incroyable au combat, puis Saki Ren, celle qui l'avait pris à ses côtés dès le début du combat, alors qu'ils avaient été pris en embuscade. Une fille bien singulière, un peu peste sur les bords, mais dont il s'était rapproché tant elle lui avait été d'une grande aide.
Après tout, ils s'étaient sauvés mutuellement, et il désirait grandement la ressusciter, de sorte à lui rendre définitivement la pareille. Aussi, de façon égoïste, si l'on perçoit la chose ainsi, il devança ses alliés en faisant sa requête...

"Il y a bien quelqu'un que je voudrais revoir, oui... C'est Saki Ren..."

Tout gêné d'avoir profité d'une aide si précieuse, n'ayant pas même laissé l'occasion à ses acolytes de dire ce qu'ils désiraient, il fixa le sol et fourra les mains dans ses grandes poches, comme un enfant timide qui aurait fait une bêtise. Puis il releva la tête et fixa encore le sabreur, la gorge encore serrée par son sentiment d'infériorité et le choix qu'il venait de faire.

"Encore une fois, merci pour tout... "

Une légère pause...

"Mais c'est absurde... Vous n'êtes même pas dans la même Chambre... Après ça, on ne se verra plus jamais... Vous pourriez ramener un proche, non?"

L'otaque observa la recomposition du vétéran à la fois vaguement soulagé de compter un survivant de plus et désappointé de voir Sakyo perdre sa place de vétéran.
Il nota ensuite l'air furtivement décontenancé du survivant face à l'accueil qu'on lui faisait.
Visiblement, Osaka est loin d'être aussi chaleureuse que Tokyo.
Il s'avança pour se joindre à la liesse quand il remarqua le regain d'activité de la sphère.
Ah, enfin.
Le premier à apparaitre fût le dernier arrivé.
Yarashin laissa passer un sifflement d'admiration.
Il attendit la réponse du vétéran qui, de l'oubli, de la force ou de l'humain, choisit l'humain.
La réponse était déconcertante, mais satisfaisait l'otaque, d'autant plus qu'il s’adressa à Sakyo, entérinant son rôle de chef.
L'otaque s'abstint de tout commentaire, laissant Sakyo exercer son droit de vie ou de mort.
Personnellement, il aurait aimé ramener quelqu'un qui savait des choses sur Gantz, comme Nishi ou cet étrange allemand mentionné dans la dernière entrée.

Vargas n’en croyait pas ses oreilles. Le sabreur n’était même de Tokyo et il refusait la possibilité de fuir l’univers horrible de cette sphère. Non seulement, il refusait une porte de sortie mais en plus il proposait à Sakyo de ressusciter une personne qui lui était cher.

Takeshi venait de gagner le respect du vieillard, un tel comportement dans une telle situation, peu de gens auraient eu les tripes de faire ce choix. Il s’avança à la même distance que l’écrivain.

"Etes-vous sur de vouloir rester?" Dit-il l’air surpris.

Il n’avait pas prêté attention au souhait de l’adolescent.

Patiemment, Takeshi attendit la réponse du romancier, acquiesçant pour répondre au vieil homme.
Un nom fut donné. Il le retint.
En face de l'air gêné et des remerciements du jeune homme, le sabreur laissa échapper un autre sourire. Il était ravi de pouvoir aider. Qu'importe qui était cette Saki aux yeux de Sakyo, si elle pouvait lui apporter soutien et réconfort dans cet enfer, là où alliés et relations humaines manquent cruellement, le sabreur pensait que le leader n'en serait que meilleur, capable d'assurer son rôle avec plus de force encore.

A la question posée, il répondit avec pragmatisme et calme.

" Non. Il n'y a pas de possibilité que je puisse ramener qui que ce soit venant d'Osaka. "

Il pointa du menton la troisième option. "En mémoire". C'était assez clair. Si une Sphère regroupait tous les Gantzers morts à travers le Japon, le tableau mortuaire - déjà assez grand ainsi, serait interminable. Les yeux clos, il rajouta.

" Et puis Sakyo-san, même si j'avais quelqu'un à ramener, je ne désire pas m'octroyer le pouvoir de décider qui a le droit de vie et de mort... "

C'était une réponse crue, qui mettait en face les responsabilités de chacun. Certes, il y avait des milliers de raisons à invoquer pour prétendre qu'un tel procédé était juste et moral, toutefois ça n'était pas le cas. Pas aux yeux de l'épéiste en tous cas. S'il choisissait cette voie de la solitude, c'était aussi pour cette raison. S'il cherchait à ramener tous ceux qui étaient décédés et qui furent des personnes justes et bonnes, il n'en finirait jamais. Il n'y avait qu'à repenser à cette petite fille, arrivée à Osaka il y a cinq mois. Elle était morte de façon horrible, et bien que Takeshi aurait donné sa vie pour la ramener, il savait que c'était profondément déraisonnable et absurde. Comment une enfant serait-elle en mesure de survivre dans un monde de cette envergure ? Tenir une arme et tuer des Martiens d'une agressivité extrême, capables d'écrabouiller des adultes armés jusqu'aux dents d'armes futuristes ? La réalité était cruelle. Trop.

" Je vous respecte, je veux cependant que vous preniez conscience de cela : chaque vie est précieuse, même si nous sommes transportés comme de vulgaires copies, nous sommes bel et bien vivants. Ne vous amusez pas à essayer de ramener parmi vous tous ceux qui vous tiennent à coeur mais qui seraient un fardeau pour vous et eux-mêmes, incapables de se défendre par leurs propres moyens... "

C'était un constat glacial mais comment penser autrement sans sombrer dans l'utopie ?
Cela dit, il redressa la tête et fixa la Sphère.

" Numéro 3, ressusciter Saki Ren. "

( HRP : excusez si je place la dernière phrase d'Akane juste avant Gantz mais j'ai déjà du changer trois fois ce post^^" )

Takeshi salua en retour Akane, il rougit même, comme intimidé par l’accueil amical dont il était l’objet. En mission, le gantzer était tellement déterminé que ce contraste était touchant. Gantz s’anima alors, montrant le portrait de Takeshi et ce qui devait être son score total. Ainsi avait-il atteint les cent fameux points. Vargas fut le premier à féliciter Takeshi, puis ce fut au tour de Sakyo de tenir les mêmes propos, exprimant également sa reconnaissance envers le bretteur. Ainsi, tous deux pensaient que Takeshi allait saisir l’occasion qui lui était offerte de se libérer de l’emprise de Gantz. En fait, la militaire pensait aussi que le jeune homme allait opter pour ce choix. Il se battait de toute évidence par nécessité, pas par choix. Une chose était sure, si Akane avait les cent points, elle ne ferait pas ce choix, et elle luttait pour ne pas secouer la tête de droite à gauche en signe de désaccord.

*Je ne dois pas montrer mes sentiments*

Avant la première mission, Zurui leur avait parlé des transpondeurs, les éléments de la sorte de bombe corticale qu’ils avaient dans le crâne. Avec ça, les gantzers étaient localisables même entre deux missions. Le risque qu’une faction ennemie les retrouve et les attaque pendant qu’ils se relâchaient n’était donc pas à négliger. Ces choses étaient-elles retirées du gantzer libéré et rendu amnésique ? Ce n’était pas sur du tout. Pour la jeune femme, il y avait deux aspects à prendre en compte. D’une part, il était possible que des souvenirs de Gantz restent accrochés à la mémoire de l’individu, qui serait placé en toute logique sous surveillance par Gantz, au cas où. D’autre part, la faction ennemie pouvait fort bien le traquer et le tuer pour se venger des actes perpétués lors des missions. Qui leur disait que l'ennemi n'était une menace que pendant les missions ? Personne, et si tel était le cas, rien ne prouverait que ce serait la vérité. Même tuer un martien n’était pas un acte sans conséquences. Dans ce cas, sans souvenir, sans équipement adapté, l’heureux libéré se révélerait être une proie facile. Tout ça, Takeshi devait le savoir, mais si ce n’était pas le cas ? La méfiance était une seconde nature chez la japonaise, la curiosité était l’un des buts de sa vie, et son esprit aventureux la pousserait à continuer à se battre contre les martiens jusqu’à ce qu’elle meurt une deuxième fois ou jusqu’à ce qu’elle parvienne à découvrir la vérité, la finalité de tout ceci. Dans cette optique, la théorie du complot même en dehors des missions Gantz justifiait le raisonnement d’Akane, mais devait-elle l’imposer à Takeshi ? La réponse était non, elle ne pouvait pas faire ça. Qu’elle se leurre éventuellement elle-même était une chose, qu’elle le fasse pour d’autres gantzers, et encore plus pour Takeshi, en était une autre. Si le bretteur renonçait à cette liberté offerte, qu’elle soit véritable ou illusoire, ce serait son propre choix. Il en irait de même s’il continuait à lutter, à se battre pour comprendre pourquoi Gantz existait, pourquoi d’autres personnes continuaient être emmenées dans cette chambre pour y survivre face à ces martiens.

*Dis quelque chose*

L’attention de Takeshi avait été à priori distraite par Vargas et Sakyo pendant que le cerveau d’Akane tournait à plein régime pour l’amener à cette conclusion de ne pas influencer le bretteur dans son choix. Or, qu’elle le veuille ou non, elle risquait de marquer sa décision. Non qu’elle ait eu l’outrecuidance de penser que sa présence pouvait à elle seule amener Takeshi à un choix plutôt qu’à un autre, mais elle pouvait avoir un geste, et même une absence de réaction, un silence qui la trahirait. Elle toussota et profita une phase de silence pour tenter de parler au gantzer au surnom si culinaire :

*Félicitations, Takeshi-san, faites le choix qui vous correspond le plus. Trouvez votre vérité.*

Elle le regardait toujours aussi amicalement, même si son sourire était un brin crispé. Elle n’avait pas parlé, elle avait pensé ces paroles.

*Baka*

Pensa-t-elle dans le même temps pour elle-même. Elle devait dire quelque chose mais avant qu’elle y parvienne, Takeshi se tourna vers Gantz, vers les trois choix qui s’offraient à lui. Il semblait hésiter, ou du moins réfléchir, puis il annonça qu’il ne voulait pas partir, qu’il lui était impossible de s’imaginer inconscient de cette réalité. Il continua en disant qu’il ne pourrait pas utiliser l’arme plus puissante proposée par Gantz, donc il demanda aux gantzers présents s’ils désiraient voir quelqu’un revenir à la vie.

*J’ai bien fait de me taire*

Songea la jeune femme, surprise par cette décision, mais les arguments de l’homme rejoignaient les siens, quelque part. Elle allait dire quelque chose mais Sakyo la devança, surpris également, puis exprimant le désir de revoir une certaine Saki Ren, tout en étant aussi gêné qu’un gamin qui serait surpris la main dans le pot de confiture. Takeshi demanda donc à Gantz de ressusciter Saki Ren. Akane se contenta de lui dire :

"Vous faites le choix qui vous correspond le plus, Takeshi-san, c'est tout à votre honneur de continuer la lutte dans cet état d'esprit. Pour ma part, je voulais protéger Himiko au péril de ma vie, elle m’a dit que ce n’était pas nécessaire, alors j’ai agi de façon offensive pour en terminer rapidement avec cette épreuve et la faire revenir dans la chambre, ainsi que tous nos alliés encore en vie à ce moment. Elle a hélas péri. Aurais-je du vous demander de la faire revenir à la vie ? Sakyo m’a sauvé la vie, il est aussi le plus altruiste d’entre nous, notre meneur naturel, il devait avoir la priorité pour ce choix. Je sais que ce n’est pas constructif mais je trouve que cet échange est déséquilibré. Pour une personne qui se dévoue ainsi pour ne pas être libérée, ce n’est pas une vie qui devrait être rendue, mais au moins quatre, à moins que cette liberté soit illusoire. Après tout, il est difficile de croire une entité qui nous envoie risquer notre vie sans la moindre explication."

Takeshi ayant fait son choix, Akane pouvait donc exprimer en partie ses soupçons. Elle les développerait par la suite. Quelques instants plus tard, Gantz exprima alors son intention de faire revenir Saki Ren, son retour n'allait donc plus tarder.